J’ai fait tra­vailler un très bon groupe d’étudiant·es sur l’hy­po­thèse « faire un rond à la place d’un point sur le i est-il un com­por­te­ment gen­ré ? ». Eh bien il semble que non ! Et que le rond à la place du « point en chef », ou « point sus­crit », réponde plus à des modes, indé­pen­dantes du genre (je met­trai en accès libre le dos­sier quand il aura été retou­ché).

Occa­sion d’ex­hu­mer une n‑ième bille­ve­sée psy­cha­na­ly­tique : selon la gra­pho­logue Monique Minet, le rond sur le i serait « une véri­table stase de la libi­do, indi­quant que la pro­blé­ma­tique œdi­pienne n’a pas été réso­lue » (citée dans Pierre-Michel Ber­trand, Le point du I. Pré­cis d’érudition poin­tilleuse, La Revue des revues N°50). Nous voi­ci bien avancé·es  — sur­tout quand on sait que le com­plexe d’Œdipe est une vue de l’es­prit de Freud, qu’il a bri­co­lée sur la seule base d’une his­toire grecque mal com­prise et de la géné­ra­li­sa­tion arbi­traire d’un seul élé­ment (flou) : sa propre auto-ana­lyse.

Il le dit lui-même dans sa lettre à Wil­helm Fliess du 15 octobre 1897 : 

« Il ne m’est venu à l’esprit qu’une seule idée ayant une valeur géné­rale. J’ai trou­vé en moi, comme par­tout ailleurs, des sen­ti­ments d’amour envers ma mère et de jalou­sie envers mon père, sen­ti­ments qui sont, je pense, com­muns à tous les jeunes enfants, même quand leur appa­ri­tion n’est pas aus­si pré­coce que chez les enfants ren­dus hys­té­riques (d’une façon ana­logue à celle de la “roman­ti­sa­tion” de l’origine chez les para­noïaques — héros, fon­da­teurs de reli­gions). S’il en est bien ain­si, on com­prend, en dépit de toutes les objec­tions ration­nelles qui s’opposent à l’hypothèse d’une inexo­rable fata­li­té, l’effet sai­sis­sant d’Œdipe Roi. […] La légende grecque a sai­si une com­pul­sion que tous recon­naissent parce que tous l’ont res­sen­tie. Chaque audi­teur fut un jour en germe, en ima­gi­na­tion, un Œdipe et s’épouvante devant la réa­li­sa­tion de son rêve trans­po­sé dans la réa­li­té, il fré­mit sui­vant toute la mesure du refou­le­ment qui sépare son état infan­tile de son état actuel ».

Voi­là com­ment, en extra­po­lant un seul cas, sub­jec­tif et peu clair, en fai­sant une relec­ture d’un mythe grec, on peut empoi­son­ner pen­dant plus d’un siècle la vie des braves gens, foutre le stress aux familles homo­pa­ren­tales et més­in­ter­prê­ter les souf­frances de nom­breux enfants.

 

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