Tous à poil ! Histoire de la nudité, en 4 épisodes sur France Culture dans le cours de l’histoire, de Xavier Mauduit.
Je recommande particulièrement les épisodes 2, sur le « sauvage », à poil cela va sans dire, avec Sandrine Lemaire et Jérôme Thomas, le 3 qui retrace avec Sylvain Villaret et Arnaud Baubérot l’histoire très ambiguë du naturisme, ratissant de l’extrême-droite aux anarchistes de gauche. J’avais d’ailleurs parlé de ces racines bizarres, qui nous mènent droit aux revendications de médecines naturelles actuelles, en chroniquant, mais je ne sais plus trop où le bouquin GENIAL de Baubérot Histoire du naturisme. Le mythe du retour à la nature (Presses universitaires de Rennes, 2004, réédité en 2015) que j’ai lu il y a deux ou trois ans.
Et surtout l’épisode 4 sur le bronzage, captivant, avec Pascal Ory qui m’a fait péter une durite avec le bikini. Je n’avais jamais fait tilt que bikini était le nom d’un atoll des îles Marshall, sur lequel les États-Unis firent d’énormes et calamiteux essais atomiques entre 1946 et 58, expulsant les habitants, irradiant toute la zone et faisant disparaître trois îles de la carte en passant. Deux concepteurs parisiens, Louis Réard et Jacques Heim s’en sont donnés à coeur joie sur le thème. Après que Heim eut lancé en 1932 « Atome, le plus petit maillot de bain du monde », Réard renchérit, notamment avec son bikini en 1946 dévoilant le nombril (oulala) et c’est la baston des slogans. Réard répond par exemple « Le Bikini, le maillot de bain plus petit que le plus petit maillot de bain du monde » puis « Le Bikini, la première bombe an-atomique ! ».
Il y aurait beaucoup de choses à raconter sur la nudité ou le refus du vêtement comme revendication politique, comme durant les douloureuses blanket protests puis dirty protests irlandaises de Kieran Nugent, Bobby Sands et d’autres qui terminèrent si atrocement (pour un aperçu, le film Hunger, de Steve McQueen, 2008), comme dans une mesure moins tragique celle de Stephen Gough The Naked Rambler dont je parle en cours si vous avez été mon étudiant·e, et même des naturistes de Montalivet, du Cap d’Agde, etc. avec tous les problèmes que ça pose, comme on peut l’entendre dans Les Pieds Sur Terre, « A poil », série de Clawdia Prolongeau de 2021.
Et si vous voulez facilement vous emparer de cette question riche avec vos enfants, montrez-leur Et Tous à poil ! de Claire Franek et Marc Daniau, aux Éditions du Rouergue, en leur racontant qu’il n’y a pas si longtemps, en février 2014, Jean-François Copé, président de l’UMP à l’époque, s’était étranglé en feuilletant le livre durant Grand Jury RTL-LCI-le Figaro, avec un magnifique effet Streisand publicitaire à la clé :
« Ça vient du centre national de documentation pédagogique, ça fait partie de la liste des livres recommandés aux enseignants pour faire la classe aux enfants de primaire », (il feuillette) A poil le bébé, à poil la baby-sitter, à poil les voisins, à poil la mamie, à poil le chien… A poil la maîtresse… Vous voyez, c’est bien pour l’autorité des professeurs ! Quand j’ai vu ça, mon sang n’a fait qu’un tour ».
Tant qu’on y est, je vous indique un excellent dossier étudiant réalisé l’an passé sur la question pas si triviale que ça : faut-il doirmir nu ou habillé dans son sac de couchage ? Ici.
J’ai bien entendu écrit cet article nu, lançant mon calbut en l’air en protestation envers la société.
Le second épisode de l’émission de France culture m’a fait penser au livre « sexe, race et colonies » sur l’image des corps des peuples sous domination coloniale. https://www.france24.com/fr/20181021-sexe-race-colonies-livre-histoire-images-domination-corps-pascal-blanchard-critiques. Tu en avais entendu parler lors de sa sortie ? Il a fait beaucoup débat.
mais carrément. Je ne me rappelle plus de la polémique, de P. Blanchard je me suis beaucoup servi de documentaires, entre autres sur les Zoos humains (avec E. Deroo de mémoire)
La polémique tournait principalement autour du fait que répertorier des centaines de photos dégradantes dans un même livre était faire violence de nouveau aux personnes photographiées. Le livre n’a pas été réédité d’ailleurs. Les quelques photos que j’en ai vu étaient effectivement glaçantes. J’ai vu passer quelques documentaires aussi sur les zoos humains, c’est d’une violence… Quand aujourd’hui j’entends certaines personnes dégueuler leurs préjugés racistes sur la sexualité des gens en fonction de leur couleur de peau, ça me rend encore plus malade je crois… Finalement, heureusement que ce genre de livres et de documentaires existent malgré les polémiques autour, ça permet de ne pas oublier d’où vient le racisme ordinaire, celui qui ne dit pas son nom et qui a même souvent été intériorisé par les personnes concernées… triste monde dans lequel nous vivons…
Merci. Triste, ce monde, mais moins triste qu’il y a 100 ans. Ca progresse (lentement… et jusqu’à ce qu’on s’écocide ?)