En écoutant une rediff de Xavier de la Porte, dans « Le code a changé » sur France Inter, je tombe sur l’émission L’homme qui voulait communiquer avec les araignées (là), qui donne la parole à l’artiste argentin Tomás Saraceno.
D’habitude, les trucs qui mélangent art et science, je suis rétif, j’ai trop vu de sociologie de l’imaginaire fastidieuse ou de psychanalyse à deux francs. Mais là, pas du tout.
Ça commence par Peter Gabriel qui a essayé de se faire accompagner au piano par des Bonobos. On dirait moi ! (le bonobo, pas Peter).
Puis, ô joie, j’entends le nom de Bruno Moulia, que je connais, chercheur à Clermont-Ferrand qui bosse sur la sensibilité des arbres d’une manière autrement plus sérieuse qu’Ernst Zürcher (voir ici). Salut Bruno ! En outre, il est grand dénonciateur de la mise en coupe réglée du système de publication par les Elsevier et consorts. Il avait co-écrit cet excellent texte « Main basse sur la science publique » que j’avais reproduit sur le site du Cortecs en 2013. Dans mes bras, Bruno.
Ensuite, j’entends causer d’araignées et de musique, avec des saxophonistes, des guitaristes… J’ai de suite repensé aux n°73 et 74, à La Hulotte (meilleur journal du monde, je l’ai déjà dit) sur les toiles géométriques, et au diapason que La Hulotte vend dans sa musette pour les faire sortir. Et j’éclate de rire à l’anecdote du clarinettiste Evan Zaporyn, qui vient essayer de stimuler une araignée par tous les moyens possibles, et n’obtient un résultat qu’en… raclant sans le vouloir sa clarinette contre la table.
Enfin, je découvre le prix Jeremy Coller, qui est censé récompenser la première communication inter-espèce, en mode « pierre de rosette » qui permettrait de comprendre la trentaine de cris de poule ou les différents meuglements d’une vache. Et l’artiste Tomás Saraceno dit en substance ceci : pourquoi aller récompenser des chercheurs d’algo, alors que de la communication inter-espèces, ça existe déjà ? Et de parler les travaux de Jessica Van der Wal sur les communications entre certains humains, en particulier les Awer (ou Aweer) du Kenya et des petits passereaux appelés « Grands indicateurs », ou greater honeyguide, « grand guide-miel » (en latin, Indicator indicator). Depuis des siècles, les humains murmurent à l’oreille desdits oiseaux, qui vont chercher les ruches sauvages et les indiquent en chantant, troquant cette indication, et donc le miel, contre la cire dont ils raffolent (pour aller plus loin, Van der Wal & al., Awer Honey-Hunting Culture With Greater Honeyguides in Coastal Kenya, Front. Conserv. Sci., 03 January 2022).
Quand Saraceno a dit que le prix d’un million de dollars devrait revenir à ces Kenyans, J. Coller et ses collègues ont fait un peu la gueule.
Je vous laisse écouter.
J’oubliais : j’ai passé du temps, avec des étudiant·es il y a quelques années, à vérifier si effectivement il y avait des raisons de penser que les éléphants par exemple, avaient pressenti le tsunami de 2004 en Asie du Sud-Est, et il semblait que non. Là, T. Saraceno nous vend (vers la minute 43’30) l’idée sympathique de fourmis indicatrices du tsunami.
Sympathique, mais qui sort un peu du chapeau. J’aimerais bien avoir une source. J’avais vaguement lu que les fourmis rousses sentaient les vibrations sismiques et sortaient de leur nid, mais là l’histoire telle qu’elle est racontée semble cousue de fil (d’araignée) blanc
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